La grande Esbrouffe
2 commentaireset ses complices, conscients ou inconscients
Il m’arrive de plus en plus souvent, en ouvrant au saut du lit ma boite mail, de tomber sur des posts ou des articles de presse qui ont le don de gâcher ma journée. C’est devenu tellement souvent qu’ils me gâchent même une partie de mes nuits. Je tourne et vire en colère depuis 2h du matin.
J’ai donc reçu hier un très aimable courrier m’informant d’une action de Cap autonomie santé et des Semeurs de santé sur le thème de l’isolement. Grand merci à ces braves personnes de se préoccuper du sujet mais là comme ailleurs, ne serait-ce pas le rôle des services publics de santé, et tout d’abord de leurs services locaux ? Je veux bien croire que puisqu’ils se défaussent, il vaut mieux que cela soit fait par d’autres instances mais, comme on n’apprend pas aux vieilles guenons à faire la grimace, on n’essaiera pas de faire croire à une ex-infirmière de service public, qui plus est, a été administrateur de son hôpital, que ce genre d’accompagnement ne peut pas être fait par des professionnels locaux.
Idem pour le fait d’envoyer du continent deux employées d’association pour sortir 3 personnes de leur domicile.
Ah ben oui, me direz-vous, mais on en manque déjà pour faire le minimum !... ça aussi, je le sais, j’ai vu comment ma mère a été traitée à l’EHPAD et comment, par exemple, elle a attrapé la dernière bronchite qui l’a emportée...
Ce serait une histoire de serpent qui se mord la queue s’il n’y avait derrière tout ça une VOLONTE POLITIQUE DETERMINEE : on fragilise les services publics en ne laissant pas le moindre rogaton sur l’os. Il sera alors facile de faire admettre (avec un 49.3...) qu’il faut privatiser tout ça !
Le comble est que s’il n’y a pas de crédits pour embaucher du personnel qualifié, on en trouve à la pelle pour détruire des locaux et en reconstruire des pimpants ! Les entreprises privées qui vont se les faire attribuer n’auront pas un fifrelin à dépenser pendant des lustres pour leur entretien !
Parlons donc d’un EHPAD, le nôtre ou un autre peu importe, d’autant plus qu’il y a encore pire ailleurs, (ça aussi j’en ai l’expérience ayant été représentante syndicale départementale et à ce titre en contact dans leurs établissements avec les salariés des maisons de retraite). Et j’ai encore des relations dans ce cercle.
Tout le monde, même les plus ignares en la matière, convient que la prise en charge d’un résident ne devrait pas se borner à la toilette et aux repas (ne parlons plus de l’entretien du linge qu’il faut quelquefois confier à la famille ou à une blanchisserie avec coût supplémentaire).
Il faut donc veiller à ce qu’il ou elle soit occupé(e) afin de ne pas aggraver la dégradation psychique.
On peut se contenter d’un agent, plus ou moins qualifié et plutôt moins que plus, qui va passer dire bonjour aux patients capables de le reconnaître, leur lire le journal et aller faire leurs courses. Si tout va bien, les quelques résidents les plus valides auront le droit d’aller de temps en temps, de plus en plus espacés, avec cet agent faire un petit tour à l’extérieur.
Ceux des résidents incapables de se trouver seuls une activité, resteront assis dans une salle commune ou, comme ma mère, feront des kilomètres à déambuler toute la journée (la nuit aussi d’ailleurs, mais là, c’était facile, il a suffi de l’enfermer...)
Certains décideurs, sous la pression des familles parfois, ou cédant à la sollicitation de volontaires en mal d’emploi, recrutent en dehors de tout cadre statutaire, des "professionnels de leur profession" qui, le plus souvent, ont une bonne pratique technique de leur art et beaucoup de bonne volonté mais aucune formation de soignant spécifique à la catégorie de patients qu’on leur confie. Cela serait acceptable si un soignant qualifié les accompagnait MAIS s’il existait, ce soignant qualifié, il pourrait lui-même encadrer l’activité proposée même si le résultat serait moins "artistique" puisque peu importe, car en ART-THERAPIE, ce n’est pas l’objet produit qui compte mais l’effet soignant de l’activité.
Reste que même cette activité du "professionnel de la profession" est très rare et surtout sujette à fluctuation politique. On en voit l’exemple en ce moment localement.
Il existe pourtant un "outil" à la disposition des recruteurs d’agents d’EHPAD c’est le statut d’AMP. Une bonne partie des agents recrutés localement n’est pas titulaire de diplôme habituellement requis et il est nécessaire d’en envoyer quelques unes en formation pour remplir les cases des postes à qualification obligatoire. Pourquoi ne pas choisir de les former comme AMP ? elles pourraient alors elles-même avoir les outils pour accompagner les résidents dans des activités sans prétention mais qui raviraient ceux des résidents qui ne demandent qu’à occuper au minimum leurs mains !
Pour encore parler de ce que je connais : avant d’arriver "Chez nous", ma mère avait été accueillie en urgence au décès de son mari dans un établissement où j’avais des relations. C’était un hôpital rural avec deux unités EHPAD. J’y ai vu des résidents souriant, mais tout aussi déments que ma mère, éplucher les légumes du repas, faire des bouquets, plier le linge plat, desservir et essuyer la table et les bols du goûter, le tout accompagné par le personnel journalier. Ma mère appelait les soignantes (avec qualification notée sur leur badge) "mes petites chéries" et les accueillait toujours avec le sourire.
Ici, ma mère, dans ses pérégrinations incessantes, était quelquefois arrivée à se faufiler dans la salle de soins et suivant la personne qui y était présente avait le grand plaisir d’essuyer les verres à médicaments. C’était trop sans doute et un petit chef a dû interdire la pratique qui n’a hélas pas duré longtemps. Quant aux termes de "petites chéries" je ne l’ai entendue qu’une fois l’employer "Chez nous" : c’est quand dans un éclair de lucidité, elle s’est rendue compte qu’elle avait changé d’hébergement et qu’elle m’a dit :" mais mes petites chéries, qu’est ce qu’elles vont devenir" (sous-entendu, si elles n’ont plus de travail)
Quand j’ai suggéré à une employée que je connaissais, isolée dans une salle pour plier des torchons, qu’elle pourrait le faire avec des résidents, elle m’a regardée avec des yeux ronds .
Quand je me rappelle les activités que nous réussissions à mener à bien avec nos patientes les plus régressées de l’Unité de Soins la plus défavorisée de notre HP, je ne peux que mesurer la détermination de nos politiques à faire advenir cette médecine à deux vitesses qui conduit à la privatisation du plus rentable.
Comment nos élus locaux peuvent-ils en être complices ???
Vos commentaires
# Le 12 juin 2023 à 17:28, par Anita
"Le rôle de l’AMP se situe à la frontière de l’éducatif et du soin. Il prend soin des personnes par une aide de proximité permanente durant leur vie quotidienne, en les accompagnant tant dans les actes essentiels de ce quotidien que dans les activités de vie sociale et de loisirs.
A travers l’accompagnement et l’aide concrète qu’il apporte, l’AMP établit une relation attentive et sécurisante pour prévenir et rompre l’isolement des personnes et essayer d’appréhender leurs besoins et leurs attentes afin de leur apporter une réponse adaptée. Il a un rôle d’éveil, d’encouragement et de soutien de la communication et de l’expression verbale ou non.
Par le soutien dans les gestes de la vie quotidienne, l’aide médico-psychologique participe donc au bien être physique et psychologique de la personne. Il contribue également à la prévention de la rupture et/ou à la réactivation du lien social par la lutte contre l’isolement, le maintien des acquis et la stimulation des potentialités."
https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000268489
# Le 14 juin 2023 à 09:13, par Anita
https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/somme/abbeville/un-bistrot-ouvre-dans-un-ehpad-pour-recreer-du-lien-social-depuis-qu-il-y-a-ca-tout-le-monde-revit-2766414.html?utm_medium=Social&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR37ONkJzOwEnLh3hhY1KZilRBP9mTWz8Ufu3aZhl-AGWGUeRJmuclyPgQ8#Echobox=1683354925-2