Le chemin de Groix (archives)
4 commentaires
À trois miles nautiques des côtes du Morbihan flotte un caillou incrusté de chapelles et serti de plages blondes. Sur Groix, les thons remplacent les coqs à la pointe des clochers, les chemins ne mènent pas à Rome, mais se perdent dans la lande et les canots ― prononcer « canote » ― se mènent toujours à la godille.
À Groix, les départs sont peut-être plus émouvants que les arrivées. Lorsque la navette qui fait la liaison entre l’île et Lorient quitte le bassin de Port-Tudy au prix d’une manœuvre qu’on n’oserait même pas tenter à bord d’un pédalo, les gens qui restent éparpillés sur les quais, font de grands moulinets avec les bras et pleurent le départ des malheureux contraints de réintégrer le tourbillon de la vie continentale. Certains vont jusqu’à grimper sur les bittes d’amarrage et se mettent à battre des ailes comme s’ils voulaient décoller dans cet air breton gonflé d’impalpables voilures. Une prétention qui ne manque pas de faire glousser les goélands. Le navire s’éloigne avec son chargement de damnés en route vers leur purgatoire de cités putrides et d’emplois du temps congestionnés. À moins que ça ne soit Groix elle-même qui ait largué les amarres et gagne le large, loin des embardées et des coups de roulis d’un monde frénétique. …
C. Migeon http://www.ar-mag.fr/
Vos commentaires
# Le 28 octobre 2013 à 18:09, par Alé/Kerlard
Votre texte est de facture poétique ; chapeau l’Artiste.
Cependant, une question me taraude : Groix est il si lointain de ces cités putrides et d’emplois du temps congestionné comme vos le dites ?
Personnellement je ne le crois pas.
Je ne peux me satisfaire à l’idée qui reflète le contenu de votre texte et qui nous dit : A GROIX , l’évolution a suspendu son vol.
Nous sommes à tout autre pareil, ni pires ni meilleurs, seulement les mêmes.
Alé de Kerlard.
# Le 28 octobre 2013 à 18:45, par Anita
Si je me remémore le temps où, en activité professionnelle, je courais entre nos quatre enfants, mes 3/8 (in)hospitalières, les activités militantes et la cité où nous habitions, je peux vous dire que débarquant à Groix, je me croyais au moins 20 à 30 ans en arrière. Je suppose qu’une mère de famille dans le même cas et habitant une cité de banlieue doit ressentir la même chose. Et ceci sans rien de péjoratif mais avec beaucoup d’envie :-)
AM
# Le 17 janvier 2014 à 21:15
c’est exactement ça.... et les moulinets avec les bras, ma famille et moi, nous sommes des pratiquants fervents.....
# Le 17 janvier 2014 à 21:29, par Anita
c’est (encore) un jour de bonté (mais pour un commentaire sympa)
Je valide alors qu’il n’est pas signé.
AM