Aux malentendants bornés
1 commentairequi n’entendent que les voix haineuses des sionistes et leurs soutiens.
Un texte transmis par Titi Robin, cet immense musicien*
« Je reviens aux jours où je rêvais d’un avenir glorieux pour mes enfants… »
Akli Ait Abdallah
"Je mourrai en silence, pendant que le monde regarde mon corps qui n’a aucune importance pour lui.
(...)
Titi Robin :
Et l’histoire, celle d’un écrivain et de sa famille, ressemble à celle de dizaines de milliers de personnes tuées par de jeunes soldats qui n’aiment pas les papillons."
Quelques mots d’un texte que Yousri Alghoul, "éminent écrivain de Gaza", a fait parvenir il y a quelques jours à son amie et correspondante israélienne Ilana Hammerman, traductrice de son métier.
Elle a traduit en hébreu, entre autres, Céline, Camus, Flaubert, Nietzsche, Kafka et García Márquez, m’indique Wikipedia.
Haaretz vient de publier le texte de Yousri Alghoul, en date du 3 septembre 2025.
Le voici, avec ce mot d’Ilana Hammerman à son pays.
"Yousri Alghoul est un éminent écrivain de la bande de Gaza. Il vit dans la ville de Gaza avec sa famille et ses quatre enfants. Nous sommes devenus correspondants et amis. Je suis la documentation qu’il m’envoie presque tous les jours et je la traduis en hébreu. J’ai reçu ce texte il y a quelques jours. Alghoul a également écrit qu’il ne quitterait pas sa ville, où il vit à côté des ruines de sa maison, même au prix de sa vie et de celle de sa famille. Il n’a nulle part où aller et n’a aucun moyen de le faire.
L’État d’Israël ne sera jamais pardonné pour l’éradication, le meurtre et la destruction perpétrés dans la bande de Gaza par son armée, avec le soutien de la plupart des citoyens du pays."
Ilana Hammerman, traductrice
Opinion - Je ne sais pas de quelle manière je mourrai : un message de mon ami à Gaza Yousri Alghoul,
"Je ne sais pas combien de jours il me reste à vivre, car la mort m’entoure de toutes parts, comme elle entoure cette ville qui saigne sans cesse.
Je ne sais pas de quelle manière je mourrai : Peut-être d’une bombe tirée par un petit drone planant dans le ciel enfumé, peut-être des éclats d’un obusier qui tire ses obus au hasard, peut-être d’un navire de chasse qui dirige ses tirs sur notre zone, qui est proche de la mer. Peut-être qu’un missile perfide tiré par un avion de reconnaissance ou un avion de guerre F-16 me tuera...
La seule chose que je sais, c’est ceci : que je ne pense plus à la façon dont je vais mourir, mais à l’endroit où mon corps reposera, si je tomberai dans les ruines près de ma maison en fuyant les obus avec mes enfants, ou si mes membres seront éparpillés sur le chemin de terre qui est rempli à ras bord de tentes. Et peut-être serai-je enterré sans même dire au revoir à ma femme et aux membres restants de ma famille.
Je peux l’imaginer maintenant dans mon esprit : Nous courons vers le camp de réfugiés de Shati, le ciel est en feu, les missiles explosent autour de nous, je tombe au sol et je vois mon jeune fils qui saigne et gémit. Je tends la main vers lui, je pleure et j’essaie de ramper jusqu’à lui, mais je découvre que je me suis transformé en morceaux épars et que des chiens sauvages s’approchent pour dévorer ce qui reste de ma chair.
Et là, entre le moment de la mort et celui de la prise de conscience, ma mémoire remonte, ma vision est nette aujourd’hui, je reviens aux jours où je rêvais d’un avenir glorieux pour mes enfants. Je les voyais médecins guérissant le cœur des gens, ingénieurs construisant une nouvelle vie à partir des ruines. Mais les occupants en ont décidé autrement : Aux yeux des jeunes soldats, les enfants palestiniens ne méritent pas de lendemain, et leurs rêves ne sont rien d’autre qu’une menace qui doit être effacée.
Je mourrai en silence, pendant que le monde regarde mon corps qui n’a aucune importance pour lui. Il se contente de s’asseoir devant les écrans de télévision et de suivre les scènes comme s’il s’agissait d’un long film d’horreur, parfois il applaudit avec des larmes froides, parfois il bâille, mais il ne crie pas. Et l’histoire, celle d’un écrivain et de sa famille, ressemble à celle de dizaines de milliers de personnes tuées par de jeunes soldats qui n’aiment pas les papillons. Comme si nous étions des créatures superflues, plus nombreuses que nécessaire pour une histoire absurde dont le seul héros est le sang.
Je mourrai pendant que mes collègues écrivains dorment et que je tourne au-dessus des nuages, des avions, des satellites, des étoiles et des galaxies, et je monterai vers Dieu et une brise chaude emportera mon esprit au-delà du dernier ciel, et un million d’enfants aux ailes d’acier m’accompagneront."
*Thierry est par ailleurs le fils d’un de mes collègues et camarades des temps glorieux de la CFDT, celle que nous avons rêvée autogestionnaire, créée par lui et ses semblables, venant de la CFTC et s’opposant à la guerre en Algérie.
Vos commentaires
# Le 3 septembre à 13:52, par Vincent
Texte prenant de réalisme. Difficile de rajouter quelque chose.
« Je mourrai en silence, pendant que le monde regarde mon corps qui n’a aucune importance pour lui. »
Juste rappeler que « le monde » frelaté dont parle l’auteur, ce sont nos gouvernements gesticulateurs, nos dirigeants tellement courageux, à la limite de la tendinite du corrugateur du sourcil à force de les froncer devant les génocidaires et de « s’émouvoir » (mon Dieu !) de temps en temps quand le génocide est trop visible, tout en criminalisant tout acte de solidarité avec les palestiniens.
Mais ce n’est pas « nous ». Et « nous » sommes nombreux à crier, et plus encore. Bien invisibilisés par les médias tenus par les milliardaires d’extrême-droite, laquais de ces mêmes dirigeants complices des génocidaires.